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Qu’est-ce que la jalousie ?
Nous abordons le douzième exposé relatif à la vie des honorables compagnonnes du prophète, Dieu soit satisfait d’elles. Nous allons nous intéresser à la partie relative à ses épouses, les mères des croyants, principalement à la troisième partie consacrée à Aïcha, Dieu soit satisfait d’elle.
Il est indéniable que Aïcha a occupé une place privilégiée dans la demeure du prophète, paix et bénédictions sur lui, ce qui a fait que les regards des compagnons se sont dirigés avec une admiration mêlée de respect, de déférence, et de vénération en direction de la demeure de la troisième mère des croyants, Aïcha, après que Dieu Tout Puissant lui eut octroyé des qualités et des faveurs, ce qui n’a pas manqué de faire naître des jalousies de la part des autres mères des croyants, Dieu soit satisfait d’elles.
Voyons ce qu’est la jalousie ? C’est une des caractéristiques dont Dieu a pourvu avantageusement l’âme humaine. Si cette jalousie de l’être humain est un phénomène neutre à l’origine, elle pousse à commettre des actions vertueuses en l’amenant à rivaliser avec autrui en ce qui concerne les actions visant l’au-delà, mais elle peut également l’amener à rivaliser avec autrui en ce qui concerne les biens de ce monde. S’il s’agit d’une jalousie concernant l’au-delà, elle est salutaire et la bienvenue ; par contre, si c’est une jalousie concernant les biens de ce monde, elle ne peut être que néfaste. Son caractère neutre à l’origine, peut être utilisé comme une échelle pour s’élever, ou, à l’inverse, comme moyen pour sombrer dans la déchéance.
La jalousie est un composant de la nature humaine, phénomène plus incrusté et nettement visible chez les femmes. Elle revêt des aspects naturels sains ainsi que les aspects les plus négatifs chez un individu. Le côté positif consiste à s’inspirer de quelqu’un qui a appris le coran dans son intégralité pour faire comme lui, ou à emprunter le chemin de la foi parce qu’il a été jaloux de la foi d’un proche, d’un ami ou d’un voisin dont la qualité supérieure en matière de foi suscite effectivement la jalousie. Je vais, dans ce contexte, vous parler d’un exemple typique que j’ai vécu :
On m’invitait chaque année dans un des orphelinats les plus connus de Damas. Les responsables de l’administration de cette institution avaient l’habitude d’y inviter les personnages de la région connus pour leur fortune, et y organisaient un dîner les soirées du mois de Ramadhan. On prévoyait un discours destiné à inciter les gens à consentir une contribution financière au budget de l’orphelinat.
C’est moi qui, chaque année, étais chargé de l’allocution dans laquelle je sensibilisais les âmes charitables auxquelles Dieu a dispensé ses largesses, à faire preuve de générosité dans cette voie.
Il est courant, lorsqu’on procède à des opérations de dons, qu’un participant déclare par exemple : « je donne cent mille… ». Son voisin intervient: « je donne deux cent mille… » et ainsi de suite ; en une quinzaine de minutes ou un peu moins, le montant global s’élève à six ou sept millions… L’année passée, l’administration de l’orphelinat a cru bon de procéder à la distribution de feuillets dans lesquels les participants étaient appelés, de façon anonyme, à reporter la somme qu’ils comptaient verser comme contribution. En fin d’opération, le montant global s’est élevé à huit cent mille seulement. Le résultat est édifiant ; la différence est de taille ! C’est ainsi que très souvent, dans des œuvres de charité, l’individu agit avec un semblant d’orgueil, une jalousie par rapport à son rival dans la course à faire le bien, sentiment des plus profitables pour les hommes.
Je vous assure que pas un seul des participants, des frères croyants, ne peut s’empêcher de s’impliquer dans une entreprise de bienfaisance, de s’adonner à des actes de piété, de se consacrer à Dieu, de se surpasser en matière de savoir, si ce qui le pousse est une forme de jalousie d’un proche, d’un ami, ou d’un voisin.
Telle est la jalousie : une donnée de la nature humaine. Elle est neutre à l’origine, mais devient un vecteur d’élévation si elle est focalisée sur les questions de l’au-delà, et devient une malédiction si elle est axée sur les questions du monde d’ici-bas.
Il faut se rendre à l’évidence que si quelqu’un devient jaloux d’autrui pour amasser les richesses, s’il se met à rivaliser avec autrui pour amasser des fortunes, perdant ainsi sa religion et l’au-delà, cette forme de jalousie est déplacée. Voyons Comment le coran en parle :
« Il dit : ‘j’ai gaspillé une grande fortune’. Pense-t-il que nul ne l’a vu ? »
Et il en dit :
« Et la miséricorde de ton Seigneur est bien meilleure que ce qu’ils amassent. »
Sous l’emprise d’une jalousie les uns des autres, les gens s’affairent à amasser des fortunes. Une sorte d’instinct pousse l’individu à se servir des aptitudes innées qu’il possède, aptitudes neutres à l’origine, pour les orienter, soit vers le bien, soit vers le mal. Si ces particularités sont utilisées pour les questions de l’au-delà, l’individu y gagne ; par contre, si elles sont orientées exclusivement vers les biens de ce monde, l’individu y perd.
La jalousie est une donnée présente chez chaque individu. Si elle est orientée vers les biens de ce monde, elle prend la forme de l’envie ; par contre, si elle est judicieusement axée sur tout ce qui a rapport avec l’au-delà, elle devient émulation. Si quelqu’un prend exemple sur un individu qui le dépasse et se met à œuvrer pour se mettre à son niveau ou le dépasser, à l’imiter pour atteindre la perfection, à le copier pour rivaliser avec lui, ce n’est plus la forme néfaste de la jalousie, mais bien la compétition la plus saine et l’émulation la plus bénéfique. Voici comment la présente le coran :
« Et en cela doivent rivaliser les compétiteurs. »
Il dit encore :
« Voila ce en quoi doivent œuvrer ceux qui œuvrent. »
La femme est naturellement jalouse, et si elle ne l’était pas, son époux n’aurait plus aucune considération pour elle. Pourquoi donc son époux l’aime-t-il ? Pour sa jalousie, car elle ne supporte pas de le voir s’intéresser à une autre femme. C’est une particularité féminine. On remarque des fois des hommes qui se plaignent de la jalousie de leurs femmes ; mais qu’en est-il si c’est le contraire ? Qu’ils imaginent si elles ne se montrent pas jalouses. Le mari sort comme il veut, il veille souvent, il a des fréquentations, et sa femme ne fait aucune remarque. Il lui vient à l’idée qu’elle ne l’aime plus, et il est très possible qu’il s’en désintéresse. La jalousie est ainsi bien incrustée chez l’être humain, surtout chez la femme où elle est quasi apparente. Elle revêt alors un aspect tout à fait normal comme elle peut devenir maladive.
L’aspect maladif apparaît lorsque l’épouse sait que son mari est croyant et intègre et ne se permet aucun écart de conduite ; mais si par exemple une femme le contacte par téléphone, l’épouse devient folle de jalousie. Cette forme de jalousie est maladive et nécessite d’être prise en charge en vue d’un traitement curatif.
La place qu’Aïcha a occupée dans le cœur du Prophète :
Lorsque cette dame honorable, Aïcha, pénétra dans la demeure du prophète, paix et bénédictions sur lui, en sa demeure à Médine, les honorables compagnons eurent connaissance que c’était la fille d’Abou-Bakr-Assiddiq, Dieu soit satisfait de lui, l’homme le plus cher dans le cœur de l’envoyé de Dieu. Elle était très jeune et très intelligente, jouissant d’un très haut niveau de raisonnement et de compréhension. Tous les regards des compagnons se tournèrent vers cette troisième demeure, le foyer de la jeune dame Aïcha.
Les autres mères des croyants en devinrent jalouses, chose tout à fait naturelle chez la gent féminine ; et le prophète, paix et bénédictions sur lui, fit le commentaire suivant à propos de cette vérité évidente :
« Seigneur, ceci est ma part en ce que je possède ; ne me tiens pas rigueur en ce que Tu possèdes et que je ne possède pas. »
Un homme est tenu d’être équitable entre ses épouses lorsqu’il en a plusieurs. C’est là la pleine équité. Par contre, l’équité absolue est hors de portée de l’homme, hors de son pouvoir, et impossible à réaliser.
Dans le recueil, le ‘sahih’ de Boukhari, Hicham nous rapporte de son père, Dieu soit satisfait de lui, ce qui suit :
« Les gens choisissent d’offrir leurs cadeaux le jour dévolu à Aïcha (au lieu des autres jours dévolus aux autres épouses du prophète, paix et bénédictions sur lui). »
Cette nouvelle épouse illumina de joie le cœur de l’envoyé de Dieu après qu’il eut perdu sa fidèle épouse Khadidja. La jeune Aïcha vint de la Mecque à Médine et prit demeure dans une petite pièce de la mosquée, pièce vers laquelle se tournèrent dorénavant tous les regards. Le narrateur Hicham continue :
« Les gens choisissent d’offrir leurs cadeaux le jour dévolu à Aïcha. Aïcha dit : ‘Mes compagnes (coépouses) se rassemblèrent chez Oum-Salama ; elles dirent’ : ‘O Oum-Salama, par Dieu ! les gens choisissent d’offrir leurs cadeaux le jour dévolu à Aïcha ; et nous voulons autant de bien pour nous que le veut Aïcha pour elle-même.’ Persuade donc le prophète, paix et bénédictions sur lui, d’ordonner aux gens de lui apporter les présents là où il pourrait se trouver, autrement dit dans n’importe quelle demeure. »
Je vous dis ceci: de par sa nature humaine, l’homme est habité par les particularités humaines. S’il maîtrise sa condition humaine et parvient à museler ses penchants, il s’élève moralement et spirituellement.
Il est connu que toutes les épouses du prophète, paix et bénédictions sur lui, sont intègres ; cependant, elles sont gouvernées par cette particularité féminine incontournable: la jalousie. C’est ainsi que la dame Safia offrit un jour au prophète un plat de nourriture savoureuse. L’ayant remarquée, Aïcha ne put retenir un élan de jalousie ni s’empêcher de briser le plat. Très perspicace, et connaissant bien la nature des femmes, on rapporte que l’envoyé de Dieu réagit en ces termes :
« Votre mère est en colère… Votre mère est en colère… »
Il est des fois où l’homme ne doit pas exiger de son épouse d’être comme lui. En tant qu’homme, il possède une grande perception des choses et une nature propre alors que la femme possède une nature distincte que Dieu lui a spécialement prévue.
Oum-Salama fit part de l’incident au prophète, paix et bénédictions en soulignant :
« il s’éloigna de moi ; lorsqu’il revint, je lui rappelai le fait ; il s’éloigna de moi ; lorsque je le lui rappelai pour la troisième fois, il me dit : ‘O Oum-Salama, ne me fais de tort en Aïcha.’»
Dans ce contexte, Dieu Tout Puissant dit :
« N’espérez-pas pour vous ce que Dieu a favorisé les uns par rapport aux autres. »
La création évolue dans une justice absolue, et notre Seigneur symbolise la sagesse absolue (Il est le Sage) et toutes ses actions sont la sagesse même. Si l’on se rend compte que Dieu Tout Puissant a accordé une faveur quelconque à un individu, il ne faut pas en ressentir de l’amertume ni montrer de l’envie. Il faut plutôt en être l’émule et emprunter la voie que cet individu a prise pour mériter soi-même cette faveur divine. Considérons ce qu’en dit le poète :
Lorsque le Roi des rois accorde une faveur ;
Lève-toi, il ne faut pas en chercher la raison.
Dieu donne à qui Il veut ;
Reste plutôt à la limite de la correction.
Considérons maintenant la réaction du prophète envers Oum-Salama :
« O Oum-Salama ! ne me fais pas de tort en Aïcha ! Par Dieu ! Aucune révélation ne m’est parvenue alors que j’étais sous la même couverture en compagnie de l’une d’entre vous, à part Aïcha. »
Il s’avère que cette épouse vertueuse était la plus proche de Dieu et la plus connaisseuse du livre divin.
De même, lorsqu’on sait qu’un individu a fourni efforts sur efforts, a sacrifié son temps, son argent et a persévéré dans le sentier de Dieu, et que Dieu Tout Puissant l’a gratifié d’une grande renommée et a accru significativement son importance, il convient de suivre les traces de cet individu au lieu de l’envier ; il convient de l’imiter dans sa persévérance au lieu de chercher à minimiser ses mérites et d’essayer de le tourner en ridicule pour ses opinions. Lorsqu’on prend connaissance d’un avantage chez quelqu’un, il convient de dire : « Dieu accorde ce qu’Il veut à qui Il veut. » et rester ainsi dans les limites de la correction envers le Créateur.
Les mères des croyants entreprirent une deuxième tentative avec l’aide de la jeune Fatima, Dieu soit satisfait d’elle, à qui elles demandèrent de s’adresser à l’envoyé de Dieu pour l’entretenir sur le sujet. Sa tentative resta vaine.
Mouslim rapporta dans son ‘Sahih’ que Aïcha, l’épouse du prophète dit :
« Les épouses de l’envoyé de Dieu déléguèrent Fatima, la fille du prophète, pour entretenir son père. Elle se présenta et demanda la permission d’entrer alors qu’il était couché. Il lui dit d’entrer. Elle lui dit : Envoyé de Dieu, tes épouses m’envoient te demander d’être équitable avec Bint-Abi-Qohafa (autant qu’avec tes autres épouses), pendant que je demeurais silencieuse. Il lui répondit: ‘Ma fille ! N’est-ce-pas que tu aimes ce que j’aime ? »
Il est clair que l’envoyé de Dieu ne peut qu’être équitable avec ses épouses ; tout simplement parce qu’un jour, un bédouin lui dit : « soit équitable, Mohamed ! » L’envoyé de Dieu répliqua :
« Malheur à toi! Qui sera équitable si je ne suis pas équitable ? »
Dieu Tout Puissant ne nous a pas exigé plus que nous pouvons supporter. L’être humain doué de perspicacité, d’une politesse à l’état pur, et d’une grande moralité, attire les gens sans qu’ils s’en rendent compte. C’est la manifestation de la volonté divine en Sa création.
« Les êtres sont enclins à aimer ceux qui leur font du bien et éprouvent du ressentiment pour ceux qui leur veulent du mal. »
Par exemple, un individu qui ne fait que critiquer un autre, qui essaye de le contrecarrer, qui essaye de ternir ses actions ; peut-il logiquement s’attendre à un comportement amical de la part de la victime de ses actions? Par contre, un autre individu très poli, très aimable, et qui rend beaucoup de services à quelqu’un d’autre ; il est tout-à-fait naturel que ce dernier ressente un attrait pour une personne aussi altruiste qui veille si bien à son bien-être. Quant au deuxième genre de personne qui ne s’intéresse qu’à l’agression d’autrui, sa victime cherche naturellement à l’éviter. C’est ainsi qu’une personne obéit à des lois: en tant qu’individu, elle est appelée à faire preuve de la plus grande équité dans tout ce qu’elle entreprend ; quant à l’équité parfaite, ni elle ni aucune autre personne ne pourra jamais la réaliser. Les individus sont naturellement portés à aimer l’idéal de perfection, la beauté, et la prodigalité.
L’être humain aime la perfection, la beauté et la prodigalité, celle qui consiste à donner, car on aime bien celui qui vous donne ; on aime bien celui qui est parfait ; et on aime bien celui que Dieu a favorisé par l‘octroi d’une belle apparence.
On rencontre des fois un père dont le fils jouit d’un rayonnement particulier. Le père se retrouve plus attiré par cet enfant que par ses autres frères ; mais il est tenu de leur donner équitablement, de leur montrer équitablement de la tendresse, car le cœur de l’homme dépend de Dieu Tout Puissant. C’est pourquoi l’envoyé de Dieu, paix et bénédictions sur lui, a dit sur le sujet :
« Seigneur, ceci est ma part en ce que je possède ; ne me tiens pas rigueur en ce que Tu possèdes et que je ne possède pas. »
« Ma petite, n’est-ce pas que tu aimes ce que j’aime ? » Avait répondu le prophète. Elle répondit : « Bien sûr que si ! » Il reprit : « Aime donc celle là ! »
Considérons un peu ce point précis par un exemple. Imaginez un jeune homme et son père. Le jeune homme défie son père. C’est un comportement répréhensible de la part du jeune homme et un manque flagrant de respect. Imaginez un autre fils qui fait preuve d’un excellent comportement, très sincère, respectueux et avenant. Le premier peut-il raisonnablement s’attendre à ce que son père lui montre un amour filial incomparable ? C’est vraiment ridicule, car un père penche naturellement vers la source du mérite, du bon comportement, de la gentillesse, de la miséricorde, du service rendu, et bien rendu… Il ne faut pas s’attendre à être aimé d’un amour non mérité, en contradiction avec le genre de comportement qu’on affiche envers autrui.
Il manque réellement de bon sens celui qui croit que les gens l’aimeront bien, qu’ils seront sincères avec lui et qu’ils lui seront dévoués alors qu’il leur occasionne du tort. C’est évidemment une attitude inconcevable. Ainsi est la nature humaine. Si quelqu’un désire s’attirer la sympathie et l’amour des cœurs, il devra faire preuve de bienfaisance envers autrui. C’est ainsi que les cœurs sont attirés par l’homme qui fait montre d’un comportement impeccable, alors que l’homme doué de puissance ne possède de pouvoir que sur les corps ; et c’est une gageure que de posséder en même temps les cœurs et les corps des gens. Il existe un immense fossé entre les deux situations.
Considérons un époux qui se montre dur avec son épouse et très imbu de sa personne ; peut-il raisonnablement s’attendre à ce que son épouse le chérisse ? Impossible ! Elle ne pourra ni le chérir ni s’intéresser à lui. S’il ne lui montre aucune attention, elle ne lui montrera aucune attention en retour ; et s’il ne lui accorde pas ses droits, elle ne lui accordera certainement pas les siens. Il convient ici de faire preuve de réalisme et de logique élémentaire.
Lorsque Fatima eut pris connaissance des paroles de l’envoyé de Dieu, paix et bénédictions sur lui, elle s’en retourna vers les honorables épouses et leur fit part de la réaction du prophète et des paroles qu’il lui avait exprimées. Elles répondirent : « Nous constatons que tu ne nous a été d’aucun secours ! Retourne voir l’envoyé de Dieu, et dis lui que ses épouses lui demandent d’être équitable autant avec la fille de Abou-Qahafa qu’avec elles. » Fatima répondit : « Par Dieu ! Je ne lui parlerai plus jamais contre elle ! »
Le prophète se comporte certainement avec une équité absolue ; mais vers qui son cœur penche-t-il ? Ceci est au dessus de tout le monde…
Les honorables épouses déléguèrent ensuite l’autre épouse, Zaïnab-Bint-Jahch qui rivalisait de statut et de faveurs avec Aïcha. Elle posa le problème, mais ne reçut rien de nouveau. Pour renseigner ses épouses sur le statut de Aïcha, le prophète, paix et bénédictions sur lui, se contenta de déclarer:
« C’est la fille de Abou-Bakr... »
Quelle preuve de fidélité que cette déclaration ! « C’est la fille de Abou-Bakr… » Très souvent, l’individu se plaint douloureusement d’entreprendre tous ses efforts pour être sincère, d’accorder tout son amour et son attention à quelqu’un qui oublie tout ce dévouement. Par contre, le prophète fait preuve d’un dévouement sans failles ; car personne n’a fait preuve d’un dévouement envers lui comme Abou-Bakr. S’agissant de la fille de ce fidèle compagnon, le prophète a confirmé l’adage populaire qui dit : « un bienfait ouvre les portes à mille bienfaits à son auteur. » Le simple fait d’être la fille de Abou-Bakr lui confère un statut particulier dans le cœur de l’envoyé de Dieu.
Même Aïcha se montre jalouse des autres mères des croyants. Si celles-ci se montraient jalouses d’elle, cette dernière l’était plus, et sa seule excuse est qu’elle était la deuxième femme dont le cœur a débordé d’amour pour le prophète après Khadidja, Dieu soit satisfait d’elle ; la demande de sa main ayant eu lieu après le décès de Khadidja, et parce que c’était la plus jeune épouse du prophète, paix et bénédictions sur lui. C’est également la seule vierge que le prophète a épousée ; telles sont les raisons qui la poussaient à s’enorgueillir devant les épouses rivales: la plus jeune d’entre elles, la fille de son plus cher compagnon, et la seule vierge choisie par le prophète, paix et bénédictions sur lui…
Cet exposé recèle une signification assez spéciale. Il est connu que dans chaque foyer, se posent des problèmes ; et il ne faut pas perdre de vue le fait que le prophète n’est qu’un homme… comme le souligne le verset suivant :
« Dis: ‘je ne suis qu’un homme comme vous’. »
Un homme se présenta un jour au domicile de Omar (alors khalife des croyants) pour se plaindre de son épouse, et frappa à sa porte. Des cris lui parvinrent de l’intérieur ; il s’en alla précipitamment.
Omar avait entendu frapper ; il ouvrit et vit un bédouin s’éloigner. Il le héla et lui fit signe de revenir. Il lui demanda : « pourquoi as-tu frappé puis t’es éloigné ? » Le bédouin répondit : « Je suis venu me plaindre à toi de ce dont tu te plains toi-même. »
C’est ainsi qu’il faut considérer ce monde ici-bas comme un lieu d’épreuves, et non comme un lieu de délices; comme une demeure d’efforts et non une demeure de joies ; et celui qui s’en rend compte ne se réjouira point dans l’opulence et ne se désolera point dans le malheur.
Il faut savoir que le monde est composé de problèmes, d’insuffisances ; et c’est une miséricorde envers les hommes. Il faut imaginer un monde qui serait conforme aux attentes des hommes. Ils en auraient assez et abhorreraient certainement la rencontre avec le Créateur, car posons-nous la question : « qu’est qui nous porte à espérer ardemment la rencontre avec Lui ? » Ce monde plein d’embûches qui ne répond aux attentes d’aucun homme : s’il octroie d’un côté, il enlève de l’autre ; s’il octroie la fortune, il n’y a pas d’enfants qui la méritent, et s’il octroie des enfants, il ne prévoit pas la fortune nécessaire à leur subsistance. Si un homme a la chance de tomber sur une épouse vertueuse, elle ne peut enfanter. Si l’épouse donne des enfants, il se peut qu’ils ne soient pas tels qu’on les veut ; et s’ils sont comme on veut, il se peut qu’ils aient un problème de santé. En fait, aucun homme ne trouve l’idéal en ce bas monde. Si cet idéal était possible, aucun homme n’aimerait rencontrer son Créateur, car l’une des raisons qui poussent l’être humain à espérer rencontrer son Créateur, est que ce monde est épuisant.
Le prophète vit une fois un convoi funèbre, il dit :
« ‘Il repose et on se repose de sa présence.’ On lui demanda : ‘Qu’entends-tu par ‘il repose’ et par ‘on se repose de sa présence ?’ Il répondit : ‘Quant au croyant, il se repose des bassesses de ce monde et de ses épreuves ; par contre, l’homme immoral : ses semblables, la contrée, les plantes et les animaux s’en trouvent débarrassés. »
Par Dieu ! Il n’y a rien dans ce monde qui soit plus valable que mourir en étant croyant, et échapper ainsi à la tentation de la vie, la tentation de l’argent, la tentation des femmes, la tentation des relations sociales, et d’autres tentations innombrables. Une noble tradition du prophète, paix et bénédictions sur lui, souligne les paroles suivantes du Tout Puissant :
« Par Ma Puissance et Ma Grandeur, Je ne rappellerai pas Ma créature humaine pour qui J’aime faire miséricorde, avant de l’éprouver pour les différents péchés qu’elle a commis, soit par une maladie dans son corps, soit par de la précarité dans sa subsistance, soit par une infortune dans ses possessions ou dans sa progéniture, jusqu’ à ce qu’il ne reste de ses péchés que l’équivalent de quelque atome. Si quelque chose en persiste, Je lui accroîtrai les affres de l’agonie afin qu’elle puisse me rencontrer en l’état dans lequel sa mère l’a mise au monde. »
La jalousie torturait Aïcha lorsqu’elle apprenait que l’envoyé de Dieu, paix et bénédictions sur lui, allait prendre une autre coépouse ; c’est ainsi qu’elle fut jalouse lorsqu’il épousa Hafsa, fille de Omar-Ibn-Al-Khattab, et elle était oppressée le jour qui était dévolu à Sawda, que le prophète avait épousée à la Mecque. Lorsqu’elle apprit que l’envoyé de Dieu avait épousé Hafsa, devenue jalouse, elle garda le silence à contrecœur et ne sut quoi faire, surtout qu’elle connaissait la position du père de cette dernière, Omar, dans le cœur du prophète, paix et bénédictions sur lui. Après Abou-Bakr, le père de Hafsa (Omar) était le favori du prophète. Voila que survint encore Hafsa pour être une autre coépouse.
Il y a un point extrêmement important : si le foyer de l’envoyé de Dieu n’avait recélé aucun problème, comment aurait-il pu être un modèle pour nous ? Si le foyer de l’envoyé de Dieu n’avait recélé aucun problème, la situation aurait été équivoque pour nous. La jalousie est un problème ; la rivalité de ses épouses est un problème ; si la vie familiale du prophète, paix et bénédictions sur lui, avait été une vie idéale dans son foyer, comment se comporter de façon exemplaire en cas de conflit au sein d’un foyer musulman ? Ainsi, le prophète est un législateur précurseur. Ce qui suit en est le meilleur exemple.
« L’envoyé de Dieu termina un jour une prière au terme de deux génuflexions (au lieu de quatre). Dhoulyadayn lui dit : « Est-ce que tu as fait exprès de raccourcir la prière ou bien as-tu oublié, o envoyé de Dieu ? Le prophète s’enquit auprès de l’assistance : Dhoulyadayn a-t-il raison ? Les gens qui étaient présents répondirent : « Oui ! » Alors le prophète se releva, accomplit deux autres génuflexions, prononça la formule de fin de prière (salam), puis prononça la formule de début de prière (takbir), se prosterna comme il avait l’habitude de le faire ou un peu plus longuement, puis prononça encore la formule (takbir), se releva, se prosterna comme il avait l’habitude de le faire ou un peu plus longuement... »
Si ce n’était pas Dieu qui m’avait fait oublier les deux génuflexions de la prière médiane, comment aurais-je pu vous montrer les prosternations consécutives à un oubli et vous indiquer comment corriger une prière incomplète ?
Ainsi, tous les problèmes qui affectent le foyer de l’envoyé de Dieu, paix et bénédictions sur lui, sont une issue favorable à nos problèmes. Dans ce contexte, Dieu Tout Puissant dit :
« Si vous vous repentez à Dieu, c’est que vos cœurs ont été réceptifs ; et si vous vous liguez contre le prophète, sachez que Dieu est son Maître. »
C’est un fait attesté par le noble coran: les épouses du prophète ne sont comparables à aucune autre femme. Considérons ce qu’il en dit :
« O épouses du prophète, vous n’êtes comparables à aucune autre femme. Si vous êtes pieuses, ne soyez pas complaisantes dans votre langage afin que celui dont le cœur est malade (l’hypocrite) ne vous convoite pas. Et tenez un langage décent. »
Le prophète a ainsi fait choisir ses épouses entre lui et ce monde.
« … Si c’est la vie présente que vous désirez et sa parure, alors venez ! Je vous donnerais (les moyens) d’en jouir et vous libérerais (par un divorce) sans préjudice. »
Cela signifie que le coran a confirmé qu’il existait des problèmes dans les foyers du prophète, paix et bénédictions sur lui, et la position du prophète par rapport à ces problèmes est une position très claire afin que nous puissions nous en inspirer comme modèles à suivre, si Dieu veut.
C’est pour cela qu’après plusieurs récriminations de la part de ses honorables épouses, récriminations suscitées par la jalousie, l’envoyé de Dieu a adopté une position ferme et s’est isolé de toutes ses épouses. Un mois entier passa dans leur ignorance alors qu’elles étaient préoccupées de lui. Quelques une ressentirent une vive inquiétude, d’autres l’attendirent patiemment sans qu’aucune d’elle n’osât lui parler. Lorsque le mois entier passa, il revint vers ses épouses, s’étant contenté de cette retraite comme leçon et avertissement pour qu’elles s’abstinssent désormais, du moins quelques unes d’entre elles, d’agir de la même manière dans leurs relations.
Une telle rivalité entre ses honorables épouses et leur jalousie aigüe ont contribué à entamer la sérénité du prophète ; ce qui lui fit prendre cette décision ferme en les délaissant toutes durant un mois entier. Après ce mois de retraite, il revint et pénétra dans la demeure de Aïcha. Elle l’accueillit avec un mince reproche disant: « O envoyé de Dieu ! Toi pour lequel je sacrifierais père et mère ; j’ai prononcé une parole à la légère ; tu t’es fâché contre moi ! »
Ce fait nous est très utile. Si un conflit surgit entre un individu et son épouse, cet individu s’habituera à être doux et aimable, et l’épouse prendra l’habitude de s’excuser ; et généralement les excuses font miraculeusement fondre les conflits. Il arrive malheureusement que des couples se disputent et font la tête pendant un mois, voire deux ou trois ou quatre ou même une année. Si l’épouse fait preuve d’un peu d’humilité en s’adressant à son mari, disant : « Excuse-moi ; je t’ai peut-être rendu furieux ; Je te prie de me pardonner ! » le conflit disparaît. De même, si l’époux s’adresse à son épouse en ces termes: « Désolé, j’ai peut-être été trop dur. J’espère que tu ne m’en voudras pas… » Le problème est tout simplement résolu…
Considérez cette réaction de Aïcha : « O envoyé de Dieu ! Toi pour lequel je sacrifierais père et mère ; j’ai prononcé une parole à la légère ; tu t’es fâché contre moi ! »
« Puis il rejoignit son épouse alors qu’elle continuait à parler. ‘Tu as juré de nous délaisser pendant un mois, alors que vingt neuf jours seulement ont passé !’ lui dit-elle en plaisantant. Il répondit: ‘En effet, le mois peut se composer de vingt neuf jours seulement.’ »
Il avait parlé d’un mois, mais il mit fin à l’isolement après vingt neuf jours. Elle lui dit: « tu avais parlé d’un mois. » Il répondit : « En effet, ce mois possède vingt neuf jours. »
C’est une marque de douceur qu’entre les époux prévalent des paroles douces, du badinage et des mots d’esprit. C’est ainsi que lorsqu’il regagnait son foyer, l’envoyé de Dieu était tout souriant, riant même. Lorsqu’un membre de la famille se présentait, le prophète disait à propos des femmes :
« Ce sont les précieuses compagnes ! »
Personnellement, je considère que l’homme le plus sage est celui qui fait preuve d’affection, de douceur, de sérénité, et que s’échangent des paroles mielleuses entre les deux époux ; et ainsi, la vie conjugale ne connaîtra pas de disputes durables.
Evoquer les problèmes qui ont caractérisé le foyer de l’envoyé de Dieu, paix et bénédictions sur lui, requiert un long développement. Il est à noter que s’il n’avait pas vécu tous les problèmes et les particularités propres aux êtres humains, il n’aurait jamais été le meilleur des êtres humains. Je considère pour ma part que comme lui, le croyant qui réussit sa vie est bien celui qui fait preuve de sagesse dans ses relations conjugales, et qui puise son bonheur de sa femme, et réciproquement. La vie conjugale est tellement courte qu’elle ne peut supporter des conflits durables ; c’est ainsi que le prophète a corrigé ses épouses par un mois d’isolement alors que de nos jours il existe des hommes qui le font une année durant, parfois deux, et même trois ans de suite. Le prophète, lui, s’est contenté d’un mois, et le problème a disparu de lui-même.
Je souhaite pour chaque époux qu’il mette bien vite un terme à la dispute. S’il vit un problème qui lui fait quitter précipitamment le foyer, qu’il y revienne le plus tôt possible et fasse comme si de rien n’était. Il s’agit là d’un excellent conseil et une attitude que les hommes devraient adopter.
La clé réside en le retour à la maison pour faire comme si de rien n’était. Si un problème fait qu’un homme se réfugie dans le sommeil, il devra se réveiller et faire en sorte que rien ne s’est passé.
Persister à faire durer le conflit une semaine ou deux, un mois, voire deux, ou bien une et même deux années, et s’entêter à faire la tête en faisant preuve d’inflexibilité dans son attitude, conduit tout droit à l’échec conjugal du couple.
Le prophète, paix et bénédictions sur lui, constitue un modèle pour nous dans ses excellentes relations avec ses épouses, même si des nobles versets ont indiqué qu’il a eu à subir des situations difficiles du fait de ses épouses. La femme est ce qu’elle est : un être avec ses particularités, connue pour sa jalousie intense, s’agrippant de toutes ses forces à la vie, voulant son mari exclusivement pour elle. Comme tous les maris possèdent une famille au sens large, si l’un offre quelque cadeau à sa famille (à part l’épouse et les enfants), c’est le début d’un problème, parce que l’épouse considère que son époux lui appartient en exclusivité, alors qu’il a bien une mère, des sœurs, des frères… Ces genres de problèmes trouvent leurs solutions dans la sagesse, dans l’équité, dans la finesse, dans les conseils judicieux. Par contre, la virulence et la violence ne règlent rien. Comme dit l’adage populaire: ‘’ à chaque dispute, on s’empresse de prononcer la formule de répudiation, et les coups commencent à pleuvoir’’ ; et les coups laissent parfois des séquelles pour la vie et des traces morales indélébiles.
Je prie Dieu Tout Puissant de pouvoir continuer cet exposé prochainement.